Comprendre et mieux gérer les émotions désagréables

Comment gérer les émotions ? Pour la plupart d'entre-nous, les émotions désagréables sont synonymes de perte de contrôle et donc de vulnérabilité. Découvrons comment les gérer...

L’une des questions qui revient fréquemment dans le cadre de mes accompagnements thérapeutiques est : « Comment gérer les émotions désagréables lorsqu’elles nous envahissent ?« 

Pour la plupart d’entre-nous, les émotions désagréables sont synonymes de perte de contrôle et donc de vulnérabilité, tant nous avons été conditionnés depuis l’enfance à rester rationnels en tout temps.

Quand la peur s’empare de nous, par exemple, notre corps se crispe, nos battements cardiaques s’accélèrent, nos pensées se mettent à tourner en boucle et notre imagination crée les pires scénarios, amplifiant encore notre impuissance.

Comprendre et gérer les émotions désagréables est donc une compétence-clé qui devrait être acquise au travers du modèle familial, et renforcée à l’école.

Il s’agit pour commencer d’accepter ce qui se passe en nous comme ayant un sens, une intention positive, puis d’identifier l’émotion qui nous habite, pour enfin rechercher le message que notre corps cherche à nous transmettre.

Plus facile à écrire qu’à faire ?

Voyons dans le détail comment procéder.

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1. Comment sont fabriquées les émotions ?

Vision classique

Depuis plus de deux millénaires les émotions sont considérées comment étant inscrites à l’intérieur de nous dès notre naissance, n’attendant qu’un déclencheur pour se manifester. Nous aurions ainsi à l’intérieur un circuit neuronal de la peur, un circuit de la tristesse, etc. Lorsque le circuit est activé, notre visage se contracte d’une certaine façon, notre posture se modifie, et la libération de certaines hormones induit des modifications à l’intérieur de notre corps tels qu’une augmentation du rythme cardiaque, de la respiration, une contraction des vaisseaux sanguins, production de sueur, etc.

Selon cette vision, nos émotions seraient un langage universel, un réflexe animal échappant à toute rationalité et tout contrôle. Il serait impossible de gérer les émotions, on les subit.

Pourtant force est de constater que les émotions varient selon les cultures, que la colère peut s’exprimer de plusieurs façons bien différentes et ne s’accompagne pas toujours d’une augmentation de la pression sanguine, ou que notre système amygdalien n’est pas toujours activé lorsque nous avons peur. Les recherches récentes et l’apport des neurosciences (et notamment le PET Scan) ont donc fortement remis en question cette vision que les émotions sont universelles et innées.

La théorie des émotions construites

Dans son livre « How Emotions Are Made« , la chercheuse Lisa Feldman Barrett synthétise les résultats scientifiques actuels basés sur les neurosciences qui démontrent clairement que les émotions sont apprises et construites à partir de nos expériences passées.

Nous apprenons très jeune que certaines sensations corporelles, survenant simultanément avec la perte d’un objet important pour nous, s’appellent de la tristesse, ou que ces mêmes sensations se produisant lorsque nous ne sommes pas sûrs de survivre s’appelle de la peur.

De plus, la peur par exemple peut s’exprimer chez une même personne de multiples façons différentes, notamment en fonction du contexte (dispute, cinéma, forêt sombre, etc.). Nos précédentes expériences et le contexte dans lequel nous nous trouvons donnent un sens à nos sensations actuelles.

En fait, notre cerveau cherche constamment à donner un sens. Il utilise nos précédentes expériences pour faire une hypothèse et compare les informations sensorielles avec le sens trouvé pour filtrer ce qui est relevant de ce qui ne l’est pas, ceci dans le but de porter notre attention là où cela est nécessaire… selon lui. Imaginez que vous dormez profondément jusqu’à ce qu’un bruit soudain vous réveille. Votre cerveau analyse à toute vitesse l’information jusqu’à trouver une hypothèse plausible satisfaisante : le lave-vaisselle, le chat, une fenêtre qui bat ou un cambrioleur. Puis vous restez à l’écoute pour confirmer ou infirmer votre hypothèse. Et je peux vous assurer que votre hypothèse ne sera pas la même si vous avez regardé un documentaire animalier ou un film d’horreur avant de vous coucher…

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D’ailleurs, en allant un peu plus loin dans les tréfonds de notre cerveau, il semble évident que lorsque l’image d’une pomme parvient sur vos rétines, cette image est transformée en signaux électriques qui remontent les nerfs optiques pour être traités dans le cortex visuel à l’arrière de votre cerveau. Traité, c’est à dire comparé avec ce que vous connaissez déjà, et même si la pomme regardée n’est pas l’exacte réplique d’une pomme déjà rencontrée, votre cerveau généralise et fait l’amalgame. En outre, il complète parfois en inventant ce qui manque : l’arrière est semblable à l’avant, la pulpe est blanche et il y a des pépins. Finalement la catégorie « pomme » est en lien plein d’autres notions basées sur vos expériences personnelles : c’est une pomme, catégorie fruits comestibles, elle a l’air appétissante, la dernière était savoureuse, ce serait agréable de manger celle que je vois là. Vos glandes salivaires sont automatiquement stimulées, de même que la production d’acide dans votre estomac pour faciliter la digestion.

Notre réalité (et donc les réactions de notre corps) est ainsi construite sur la base de nos expériences et apprentissages ! De nouvelles expériences vont faire évoluer cette réalité, doucement ou brutalement. C’est d’ailleurs le principe de toute thérapie…

Testez un dessert que vous ne connaissez pas encore, par exemple avec une sorte de crème de couleur rose. Vous vous attendez à manger quelque chose de sucré, probablement parfumé à la fraise ou à la framboise. Mais voilà que lorsque vous portez ce dessert à votre bouche, il a une odeur de poisson… Vous allez sans doute trouver cela dégoutant. Celles et ceux d’entre-vous ayant déjà approché un durian auront un avant-goût de ce dont je parle.

Imaginez maintenant qu’une araignée apparaisse juste devant vous, sur votre écran. Peut-être que cette hallucination provoque un simple sourire, ou peut-être qu’elle génère en vous sueur froide et tachycardie si vous avez ce type de phobie.

Ou encore imaginez le/la partenaire sexy de vos rêves, ou que vous croquez dans un quartier de citron, ou qu’un individu est pris de nausées. Votre corps va instantanément réagir, et nous allons donner un sens à ce que l’on éprouve.

Nos émotions sont donc construites sur la base de concepts qui simulent le monde extérieur en fonction de nos expériences passées. De la même façon, notre cerveau donne un nom aux sensations internes de notre corps en fonction de nos apprentissages passés et du contexte !

Du point de vue de votre cerveau, les informations provenant de votre corps ne sont qu’une autre source de données sensorielles (intéroception). Ces sensations corporelles n’ont pas de signification objective. Dès qu’un contexte se rajoute, votre cerveau peut attribuer un sens. Si vous sentez une tension au niveau de votre estomac à l’heure du repas, vous pouvez l’appeler « faim ». Si vous êtes grippé(e), cette même sensation risque fort de s’appeler « nausée », alors que si vous êtes sur le point de donner une conférence vous l’appellerez « trac ». Et si vous vous trouvez dans la salle d’attente de votre docteur, vous identifierez cette sensation avec de l’anxiété. Si vous êtes dans une voiture qui dérape sur une plaque de verglas ce sera de la peur, alors que sur un grand huit de fête foraine ce sera de l’excitation.

Il y a plusieurs symptômes et comportements très différents de la peur. Parfois nous avons une boule au ventre, parfois nous nous enfuyons à toutes jambes, parfois même la peur a une composante agréable comme dans une attraction foraine ou un saut à l’élastique.

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En sens contraire, notre corps présente souvent des symptômes qui sont identiques dans plusieurs émotions. Une décharge d’adrénaline va provoquer un accroissement du rythme cardiaque, votre cœur s’emballe et palpite fortement dans votre poitrine, mais est-ce de la peur ou de la colère, ou de la gêne ?

Quoi qu’il en soit, notre cœur n’a pas pour habitude de s’emballer tout seul. Nos systèmes de régulation nerveux et hormonaux pilotent le fonctionnement de notre corps, allouant automatiquement les dépenses d’énergie aux endroits adaptés selon les situations, sans que notre conscience ait à intervenir. Mais les ordres initiaux proviennent bien de notre système nerveux central qui détecte une anomalie par rapport aux prévisions, émet des hypothèses et en sélectionne la plus probable, puis donne les ordres nécessaires à notre corps afin qu’il ait les ressources pour agir si nécessaire (allostasis).

Ainsi une émotion est la création de votre cerveau, qui donne un sens à vos sensations corporelles survenues « automatiquement » suite à une hypothèse en relation avec le contexte de votre environnement !

Ce chapitre était long et j’espère que vous m’en pardonnerez, mais apprendre à gérer les émotions nécessite de comprendre comment elles sont fabriquées. Vous percevez probablement déjà que là où la vision classique des émotions nous plaçait en « spectateur impuissant » en séparant la partie du cerveau siège des émotions de la partie rationnelle, les découvertes actuelles nous redonnent une place active dans la création de nos émotions, donc le choix et la responsabilité. Nous sommes les architectes de nos propres expériences !

2. A quoi servent les émotions ?

Comment vivons-nous le décès d’un proche, par exemple ? Ce peut être une souffrance atroce, la perte d’une partie de soi, une émotion de tristesse, voire une sorte de calme si l’on considère ce départ comme un soulagement, une délivrance pour soi ou pour la personne décédée.

L’expérience physique que nous allons éventuellement ressentir dépend, nous l’avons vu, de l’hypothèse (ou croyance) dominante que nous avons à ce sujet. Nous sommes relativement insensibles à la mort de soldats inconnus à l’étranger, mais émotionnellement impactés par la disparition d’être ou d’animaux avec lesquels nous avons partagé des parts de notre existence. Les larmes qui peuvent surgir spontanément, l’apathie ou les réactions d’injustice sont autant d’expressions visibles, d’indices sur nos pensées profondes à ce sujet. Il y a eu une pensée au fond de nous qui s’est imposée et a provoqué les changements corporels que nous pouvons observer.

On pourrait donc dire que la partie physique d’une émotion est un signal qui à la fois nous permet de nous adapter, mais aussi qui attire notre attention et nous invite à réfléchir à ce qui nous arrive afin de trouver la motivation pour rétablir l’équilibre. Tout comme le témoin clignotant rouge sur le tableau de bord de notre voiture nous incite vivement à nous intéresser au problème et à refaire le plein d’essence, par exemple.

Par la même occasion, c’est également un signal à destination des autres membres du clan, une forme de communication non verbale qui alerte le groupe sur un événement potentiellement important pour eux également.

Dans mon activité de thérapeute, les émotions sont le fuel, l’énergie qui va alimenter tout changement. Lorsque mon client ne présente pas de vraie émotion par rapport à son problème, c’est l’indication claire qu’il n’y a pas de mobilisation interne pour changer, que les réels éléments posant problème n’ont pas été découverts. Lorsque la croyance dérangeante émerge, il se produit toujours une émotion d’origine inconsciente qui nous indique la piste à suivre.

Mais normalement pas besoin d’un thérapeute pour gérer les émotions. Découvrons ensemble comment y parvenir seul(e).

3. Accepter les symptômes émotionnels

Nous l’avons vu plus haut, notre cerveau prépare notre corps en fonction de la pensée/croyance qu’il a retenu. C’est donc un mécanisme parfaitement sain et naturel d’adaptation qui est en action (même si les sensations ne sont pas agréables). De même que vous saignez quand vous vous coupez, ou que vous avez de la fièvre quand votre organisme lutte contre une infection, notre cerveau déclenche les mécanismes adaptés à ce qui nous arrive. Lutter contre ces mécanismes naturels est la meilleure façon de gaspiller son énergie physique et mentale, puisque notre cerveau va devoir sur-compenser afin de tenter de rétablir les symptômes que nous avons volontairement masqués. Et c’est l’escalade…

On pourrait considérer que « notre corps nous parle », même si en fait c’est le cerveau qui se cache derrière les paroles de notre corps. Alors quel est le message ???

4. Identifier l’émotion en cause

Afin d’identifier le message, nous pouvons déjà commencer par nommer l’émotion qui nous habite. Est-ce de la peur ou de la tristesse ? Est-ce de la colère ou du dégoût ? Car nous l’avons vu, des mêmes symptômes peuvent exprimer des émotions bien différentes, tout comme une émotion peut se matérialiser de plein de façons.

Identifier et nommer l’émotion en cause va également nous faire passer du statut passif au statut actif en mobilisant nos facultés mentales. Au lieu d’être un corps qui souffre, nous ressentons de la peur. Nous pouvons également partager ce label avec nos proches, extérioriser ce qui se passe en nous.

Il ne s’agit évidemment pas de se répéter en boucle : « J’ai peur, j’ai peur, j’ai vraiment très peur, oh que j’ai peur…! » mais simplement de prendre un minimum de distance avec ses sensations.

5. Purger le trop-plein d’énergie

Il arrive parfois que l’émotion soit si grande qu’elle s’empare de notre corps et semble nous envahir complètement. Nous pleurons, nous sanglotons, nous hurlons. Et cela fait du bien, il faut le reconnaître. Cette énergie emprisonnée peut et doit sortir, il faut simplement l’accepter. Un peu comme une marmite à vapeur que l’on ne peut pas ouvrir lorsqu’elle est sous pression. Purger cette énergie va nous donner accès à la suite, à la réflexion et à l’action.

Comme avec une personne victime d’une crise d’épilepsie, nous pouvons protéger, entourer, accompagner par notre présence et notre attention. Mais les injonctions visant à stopper cette libération d’énergie, hélas trop souvent entendues dans notre enfance « Sois forte, il ne faut pas pleurer » etc, ou les bons conseils du genre « Ce n’est pas si grave, ça va aller… » sont évidemment contreproductifs. C’est un peu comme masquer le voyant d’alarme en disant que tout ira bien.

Ce qui est naturel a sa place, et c’est ainsi.

6. Rechercher la signification du message émotionnel

Une fois la période de crise passée, notre cerveau recommence à fonctionner normalement et nous pouvons influencer le processus mental. Alors quel est le message derrière notre émotion ? Quelle est la pensée qui déclenche tout cela ? Quel est le sens de ce qui m’arrive ? Qu’est-ce qui est si important pour moi ? Que puis-je en apprendre ?

Autant de questions auxquelles nous pouvons réfléchir, et qui doivent déboucher sur des actions et des apprentissages. Car lorsque le message derrière l’émotion a été compris et que nous en faisons quelque chose, l’émotion diminue jusqu’à disparaître. Elle a rempli son rôle. Nous restons cependant marqués pour la vie par l’événement, car l’émotion a également pour conséquence d’inscrire l’apprentissage dans notre mémoire des expériences importantes. C’est une sorte de cicatrice mentale.

7. Réfléchir et identifier des actions possibles

Alors quelles sont les actions possibles ? De quoi ai-je besoin et comment l’atteindre ? Afin de stimuler les capacités d’imagination de notre cerveau, il est important de ne pas se contenter de la première réponse qui nous vient à l’esprit, mais plutôt de chercher à dresser une liste de tout ce que je pourrais avoir besoin dans cette situation, et de plusieurs actions possibles pour chaque cas.

Imaginons une personne qui se réveille le matin avec une sensation d’oppression dans la poitrine. Peut-être a-t-elle tout simplement dormi dans une position inconfortable. Ou peut-être que cette sensation va être interprétée comme le début d’une crise d’anxiété. Si l’on adopte la marche à suivre exposée plus haut, cette personne va faire l’effort d’accepter ces signaux corporels pour ce qu’ils sont réellement, à savoir un message de douleur provenant d’une région plus ou moins diffuse de notre corps. Observer ces sensations, délimiter la zone, le type de douleur, son intensité, ce qui la modifie lorsque l’on respire plus ou moins profondément, etc.

Puis la personne devrait pouvoir mettre un nom sur ce qu’elle ressent, probablement de la peur dans le cas de l’anxiété.

Comme dans ce cas il n’y a pas de brutale libération d’énergie, la personne peut passer à l’étape suivante et se demander quel est le message derrière ces sensations de peur. Qu’est-ce que mon corps cherche à me dire par là ? Que je suis en train d’avoir une crise cardiaque ? Ou que je ne suis pas sûr de pouvoir gérer mon travail, mes problèmes familiaux ou autre ? Quelle est la pensée derrière tout cela ?

On pourrait imaginer le dialogue intérieur suivant : « Ah oui, ma vie est devenue ingérable, je perds pieds et ne contrôle plus rien. Ok, normal d’avoir peur alors ! Bon, et alors ? Quel est le problème exactement ? D’abord il y a mon travail. Enfin plus particulièrement mon chef qui… […], et il y a aussi mon conjoint qui… […], et puis aussi… ! Oui cela fait beaucoup, normal qu’il faille régler tout cela. Bon de quoi ai-je besoin exactement ? Concernant mon travail, ce serait bien d’avoir un autre chef. Bon, là cela ne risque pas d’arriver… Mais que puis-je faire de différent ? Peut-être que je pourrais…, ou alors… […] Et concernant mon conjoint j’aurais vraiment besoin qu’il… Comment le lui dire ? Ou le lui faire comprendre ? Ah oui je pourrais essayer cela…« 

Découper un problème apparemment insoluble en plus petits morceaux, chercher ce qui nous manque, ce qui est important pour nous, puis trouver de multiples façons de s’en rapprocher permet de mobiliser nos ressources, nos compétences, nos précédents apprentissages, et de sortir d’une émotion autrement si globale qu’elle en est ingérable. Cela permet également de faire le tri entre ce qui dépend de nous par rapport à ce que l’on ne peut changer directement.

8. Tester l’action qui nous semble la plus adaptée

Notre cerveau fonctionne naturellement sur la base d’hypothèses et de simulations, tout cela automatiquement. Mais si vous vous mettez à l’écoute de vos pensées, vous remarquerez que nous anticipons sans cesse ce que nous pourrions faire, manger, etc. et que nous nous projetons dans les différentes possibilités pour en retenir celle qui nous semble la meilleure pour répondre à nos besoins actuels. Puis nous comparons les résultats avec ce que nous avions imaginé et corrigeons lorsqu’il y a une déviation, que ce soit une simple adaptation ou le choix d’une autre action plus prometteuse.

C’est donc très naturellement que nous allons retenir et tester la ou les actions qui nous semblent le mieux adaptées à chaque segment de notre problème. Nous avons quitté le mode « crise » pour retrouver l’usage naturel de nos capacités d’analyse, de choix, d’évaluation et de correction.

L’émotion, avec toute son énergie, est ainsi un signal issu de notre cerveau qui prépare notre corps à l’action et force notre attention sur un problème à résoudre sans délai. Reconnaître que l’on est entré dans ce mode « impératif » nous donne la clé et l’énergie pour utiliser nos capacités naturelles afin d’identifier, mettre en œuvre, évaluer et améliorer des solutions.

9. Un peu de prophylaxie

Est-il possible de prévenir de trop violentes poussées d’émotions ? Certainement, et cela de plusieurs manières différentes.

Il faut tout d’abord remarquer que certaines personnes adorent vivre au travers des émotions. Elles ont besoin de ressentir ces sensations fortes pour être pleinement vivantes. En choisissant des pensées et croyances particulièrement extrêmes, cela va systématiquement les mettre en mode « problème » par rapport à leur environnement et générer des émotions.

Mais pour celles et ceux pour qui les émotions sont trop nombreuses et dérangeantes, un peu d’introspection prophylactique pourrait être utile. Imaginez que certains voyants d’alarme de votre voiture s’allument à chaque utilisation… Peut-être serait-il temps de faire le point et d’envisager une solution plus globale.

Nous vivons dans un monde complexe où les sources de problèmes ne manquent pas, des problèmes dans lesquels on peut facilement se sentir coincés et impuissants. Notre cerveau peine à imaginer des solutions réalistes qui répondent simultanément à tous nos critères.

Il est alors nécessaire d’élaguer, ou plutôt de prendre le temps d’identifier et prioriser nos besoins, nos valeurs, nos aspirations, nos buts. Qu’est-ce qui est vital pour moi dans ma vie ? Qu’est-ce qui est important, et qu’est-ce qui l’est moins…

Prendre un moment pour être en rapport avec soi-même, que ce soit lors d’une promenade dans la nature ou un moment de méditation, est absolument essentiel afin de libérer notre cerveau des préoccupations immédiates et lui permettre de prendre du recul, comparer, apprécier et retrouver l’essentiel. Dézoomer, défocaliser, se déshypnotiser pour redécouvrir les différentes couches qui composent notre vie et donner l’opportunité à notre cerveau d’œuvrer à ce niveau également.

10. Et si cela ne suffit pas

Il arrive parfois que nous soyons englués dans nos soucis quotidiens au point que cette prise de distance devient impossible. Les problèmes sont là, les émotions nous submergent, il n’y a pas de solution en vue et cela dure depuis trop longtemps. Nous n’avons plus d’énergie et sommes sur le point d’abandonner une lutte qu’il nous semble impossible de surmonter. Nous entrons en burn-out ou en dépression pour économiser le peu d’énergie qu’il nous reste.

Et c’est une merveilleuse solution, temporaire, à une situation qui semble sans issue. Comme un ordinateur dont le processeur arrive à saturation, notre cerveau « reboote », recharge les différentes couches depuis nos besoins fondamentaux, soupèse nos vraies valeurs, et reconstruit petit à petit une arborescence mentale qui fasse sens en correspondant à qui nous sommes réellement.

11. Conclusion

Les recherches scientifiques modernes ont mis à mal l’ancien modèle platonicien de la lutte du cerveau émotionnel (« limbique« ) contre la partie rationnelle (« cortex préfrontal »). Intuitivement la peur accompagnée par une action de fuite est une réponse parfaitement adaptée rationnellement à l’apparition d’un danger.

Les émotions ne sont pas générées automatiquement par une partie localisée de notre cerveau, la peur n’est pas déclenchée par notre système amygdalien par exemple, mais elle résulte d’une pensée construite, une hypothèse généralement inconsciente issue de nos expériences passées, qui est adoptée comme probable et entraîne dans sa cascade de conséquences la préparation de notre corps à l’action.

Lorsque nous détectons ces changements corporels, nous leur attribuons un sens en fonction du contexte dans lequel nous nous trouvons. Cela aura pour conséquences de faire évoluer nos pensées et d’amplifier, modifier, ou réduire les symptômes.

Nous sommes ainsi les créateurs de nos émotions primaires, et surtout les responsables de leur évolution par le sens que nous choisissons de donner à ce qui nous arrive. Gérer les émotions, c’est donc avant tout comprendre leur utilité et prendre soin de notre discours interne, car les mots que nous choisissons aujourd’hui constituent la maison que nous habiterons demain.